Mauvaise journée

Y'a des jours - enfin, des soirs surtout... - où j'en ai plein le cul de me forcer pis d'être "fine"...

Mauvaise journée.
En fait, pas vraiment "mauvaise", plus "chiante". Plus "plate et frustrante"...

J'ai passé la fin de semaine à donner un training à la fille qui va me remplacer à la boutique.
Caaaaaalvâsse... Quand je disais que je voulais pas enseigner, moi... c'est pour ça !

La "ptite" (tout juste 18 ans, 1ere job...) est ben correcte... gênée, mais capable. Bref, pas une mauvaise élève pentoute. Mais criiiiiisti que ça a été plate ! J'pouvais RIEN faire ! Depuis deux jours, quand je veux travailler, on me réprimande ! "Montre-le à la nouvelle...", "mets-la devant l'ordi !", "fais-la pratiquer !", "laisse-la faire toute seule ! sinon quand tu seras pas là, elle va paniquer..." AAAAAARG ! MAIS J'M'EMMEEEERDE !!!! Chu pas une potiche ! Vous le savez, pourtant : j'suis pas capable de rien faire quand j'suis dans la boutique ! Je vais même jusqu'à replier les chandails déjà pliés, quand y'a pas de clients ! Je trouve ça pire d'être payée à rien faire que de courir partout comme une poule pas de tête !

Déjà, donner un training, c'est fatiguant intellectuellement. Ça a l'air de rien, mais il faut réfléchir à tout ce qu'on fait, tout expliquer en détails le "comment" et le "pourquoi" de choses qui sont devenues des automatismes pour nous...
Mais, en plus, de l'avoir toujours collé aux baskets... Ah non, hein !

À la fin de la journée, j'avais trop le goût de reprendre mes jouets... La patience commençait à me manquer à mesure que je me sentais de trop dans ma job. Une caissière, ça a besoin de tout le peu d'espace vital qu'il y a derrière son comptoir ! Si bien que, vers 4h, cet espace me semblait de plus en plus exigu pour nous deux...
J'avais envie de reprendre possession de mon gun laser, bon ! Je voulais classer mes papiers, faire mes transferts, jouer avec la calculatrice, m'amuser à l'ordi, compter mes sous ! Je voulais reprendre ma place, plutôt que d'être la gentille prof dont on aurait bientôt plus besoin du tout...

Jalouse ? Oui et non... Oui, parce qu'elle faisait les tâches le fun (les factures et les transferts) pendant que je m'ennuyais pour mourir à la regarder taponner sur le clavier avec l'ineffiacité des débutants... En même temps, je me disais simplement qu'elle n'avait plus réellement besoin de m'avoir dans son dos, que je perdais du temps que je sais précieux et que tout ce que je voulais, c'est de me sentir vraiment utile. J'avais besoin d'aider ma gang concrètement, moi ! Comme employée, je suis serviable, empressée, éveillée, créative, méthodique et, autant que possible, efficace. Ça me tue de rester plantée là, les bras ballants !

C'est avec cette journée moche dans le corps que j'ai quasi-obstiné l'assistante-gérante pour la première fois depuis les presque-2 mois que je travaille là :
- Non, je n'avais pas encore fait sortir les premiers papiers de fermerture à "la ptite". Je m'étais concentrée sur une autre opération avant.
- Mais elle m'avait demandé de le faire il y a 2 minutes...
- Oui, mais il y avait encore des clientes dans le magasin; si elles achetaient quelque chose à cette heure, il faudrait tout recommencer...
- Que je lui fasse faire maintenant.
- Mais j'avais penser que....
- Les clientes ne prendraient rien.
- M'enfin, j'aurais cru bon de...
- Elles ne prendraient rien.

Mais les clientes ont pris quelque chose. Et l'ordinateur était bloqué par ce début de fermerture de caisse pour les 10 prochaines minutes. Et il était 5h05...

À 5h30, on est sorti de la boutique... J'ai été fine encore : j'ai souri, dit "bonsoir", dit "à la prochaine", "à jeudi"... Répété à "la ptite" que "ça va bien aller, samedi prochain. Si y'a quoique ce soit..." blablabla... moults recommendations, encouragements, tips en tous genres...

Mais vraiment, j'arrive ce soir et j'en ai plein le cul.
Écoeurée d'avoir fait une demie-heure de travail supplémentaire non-payée sur une journée moche à cause d'un manque de respect des gens pour nos vies de pauvres petites employées idiotes et sans avenir (SIIIIIC, madame ! Vous avez pas idée !) et de retourner chez moi crevée sans avoir accomplie la moindre chose aujourd'hui afin d'entraîner celle qui, en fin de compte, gardera peut-être le job que je pensais récupérer cette année...